Cette année la Fête du Trône au Maroc était également celle des vingt-cinq ans de règne du Roi Mohammed VI, intronisé le 30 juillet 1999.
C’est l’occasion de dresser le bilan provisoire d’un quart de siècle de règne et de célébrer l’oeuvre du Roi. Celui-ci, plutôt méconnu au début de son règne, s’est affirmé comme un monarque ayant des projets pour son règne et pour l’avenir. En cela, il s’inscrit dans la lignée de ses prédécesseurs, le fondateur Mohammed V, et le Roi Hassan II, restaurateur de la pleine souveraineté et de l’autorité de l’État. Son règne fait écho à celui du fondateur de la dynastie, Moulay Rachid, chérif alaouite du Tafilalet qui, en 1660, s’empare de Fez puis domine aisément l’ensemble du Maroc. À ce « Louis XIV du Maghreb », évoqué par J. Benoist Méchin (Histoire des Alaouites, Paris, 2010), Mohammed VI fait écho par l’oeuvre accomplie pendant ses vingt-cinq ans de règne. Roi visionnaire, il est aussi un roi populaire par son humanité qui se manifeste aussi bien dans ses contacts spontanés avec le peuple que dans les préoccupations qui ont inspiré son œuvre économique et sociale, humanitaire, politique pour la transformation spectaculaire du Royaume en un État moderne qui jouit d’une autorité prestigieuse dans le monde arabe, de respect et de confiance en Occident et en Asie, d’une influence certaine et grandissante en Afrique.
On ne peut que constater que tout en conservant et préservant ce qui fait l’âme du Royaume, un Royaume plus que millénaire, le Roi Mohammed VI s’est inscrit dans les pas de ses ancêtres pour ancrer le pays dans son temps, sans renier ce qui le caractérise.
Dans les différents domaines qui vont être maintenant évoqués, on ne pourra que constater la marque de l’action du Roi Mohammed VI et le succès des projets qu’il a entendu mettre en œuvre.
Un souci constant d’assurer la cohésion nationale et religieuse
. Le Souverain marocain a voulu assurer la cohésion nationale par un geste fort et audacieux. Dès le 12 avril 2004, il met en place l’Instance équité et réconciliation (IER) dans le but de réconcilier le peuple marocain avec son passé et le sombre épisode des années de plomb. C’est une première dans le monde arabe, qui traduit le sens politique du Souverain et son « ancrage » dans le réel, ce qui le conduit à ne rien occulter, même ce qui peut apparaître comme gênant.
. En octobre de cette même année 2004, Mohammed VI initie un début de révolution juridique et sociale en consacrant l’égalité homme-femme et en renforçant les droits des femmes au sein de la cellule familiale avec la réforme de la Moudawana. Une évolution qui se poursuit jusqu’à nos jours, avec un nouveau texte à l’étude et une nouvelle génération de réformes pour davantage de justice et d’équité.
. Lorsque le 16 mai 2003, le Maroc est frappé dans sa chair par un phénomène devenu mondial, et que Casablanca est la cible d’attentats qui font 45 morts, le Royaume, sous la conduite de son Roi, fait face et réagit sereinement. C’est ainsi qu’est réformé l’appareil sécuritaire du pays dans une approche qui participe d’une vision globale intégrant notamment la question religieuse, ce qui est la marque d’une exacte compréhension de la situation et des enjeux.
Cette appréhension de la question – essentielle et pertinente – a fait que l’expertise des services de sécurité marocains est reconnue au plan international et est sollicitée par de nombreux pays.
Le Royaume a ainsi échappé à ce qu’il est convenu d’appeler – faussement – les « Printemps arabes », qui se sont caractérisés en réalité par les tentatives – réussies parfois – animées par des agents étrangers, de déstabilisation des États en usant de toutes les ressources de l’ingénierie sociale mâtinées d’importants moyens financiers. L’objectif était essentiellement de faire perdre toute ou partie de leur souveraineté aux États visés.
Le Maroc, en raison de son existence millénaire et de l’action continue de ses Souverains en vue de défendre son intégrité et sa souveraineté, a pu se trouver en dehors de ces mouvements instrumentalisés et abusivement qualifiés de « populaires » et a, au contraire, renforcé sa cohésion.
. Il convient d’insister également sur le fait que le Roi est également Commandeur des Croyants, Amir Al-Mouminine, ce qui vaut également pour la communauté juive marocaine, d’ici et d’ailleurs, attachée tant à sa marocanité qu’à son Roi. Cette qualité lui permet de lutter contre l’extrémisme religieux en assurant la persistance d’un islam tolérant, sans qu’il perde pour autant sa rigueur. C’est dans cet objectif, qu’en 2014, un Dahir a promulgué la création de l’Institut Mohammed VI de Formation des Imams Mourchidine et Mourchidat, dont la première tranche a été inaugurée en mars 2015 par le Roi.
Cet Institut reçoit des étudiants masculins, mais également féminins, qui reçoivent une bourse mensuelle de deux mille dirhams. Les diplômés des deux sexes parmi les Marocains perçoivent un salaire égal à celui perçu par un administrateur adjoint de l’administration publique, en plus d’une couverture maladie et du droit à la promotion.
Chaque imam instructeur diplômé est affecté dans une circonscription territoriale où se trouvent un Conseil Local des Oulémas et une Délégation du Ministère des Habous et des Affaires Islamiques, couvrant ainsi la totalité du territoire national. Il en est de même pour les instructrices.
La mission de l’imam instructeur est d’être au service des imams travaillant dans les mosquées et d’encadrer les citoyens dans toutes leurs exigences religieuses. La mission de l’instructrice est de prodiguer un encadrement similaire aux femmes, sauf qu’elle ne dirige pas la prière.
L’encadrement requis des imams instructeurs et des instructrices s’effectue selon un programme déterminé par le Conseil Local des Oulémas ou selon des demandes spécifiques du Délégué Local du Ministère.
Par ailleurs, le Roi Mohammed VI, répondant à un appel de nombreux pays d’Afrique, d’Europe et d’Asie, a ordonné à l’Institut de faire bénéficier de la formation des promotions d’étudiants étrangers, ce qui illustre la volonté de placer l’objectif de lutte contre l’extrémisme religieux dans un cadre international, au service de la communauté des Croyants (la durée de la formation des étudiants étrangers est comprise entre 6 mois et 3 ans).
C’est ainsi que face à ces épreuves, le pays a su les affronter et les dépasser pour être plus fort et autonome, donc souverain, en puisant de façon prépondérante dans ses ressources internes.
. Le souci de la cohésion nationale s’est manifesté aussi lors du tremblement de terre d’Al Hoceima, survenu le 24 février 2004 et causant la mort d’au moins 628 personnes et qui a vu le pays l’affronter dans l’unité. Mais aussi et surtout le séisme d’Al Haouz, survenu le 8 septembre 2023. Pour dramatique qu’il fut, ce dernier événement a démontré la solidité et la résilience d’un peuple qui n’a fait qu’un, se mobilisant auprès des sinistrés, l’efficacité et la réactivité des autorités du pays et le total engagement du Roi Mohammed VI, qui s’est personnellement impliqué au service de son peuple. Comme pour Agadir en 1960, les séismes d’Al Hoceima et d’Al Haouz ont été non seulement des leçons de solidarité, mais aussi des nouveaux départs pour des régions entières, qui vont voir leurs infrastructures précisément examinées et renouvelées ou renforcées.
. Sans oublier le véritable test qu’a été la pandémie du Covid-19 dont le Maroc est sorti grandi, mobilisant ses ressources médicales et financières au profit des victimes et des plus démunis, transformant son outil industriel pour être au rendez-vous des besoins ponctuels propres à cet éprouvant moment.
. De ces épreuves, le Maroc a su tirer les leçons idoines en termes de renforcement de sa souveraineté alimentaire, médicale, industrielle, énergétique pour être en mesure de pouvoir avancer dans son développement en comptant sur ses propres ressources et sur son peuple.
Une action intensive pour renforcer la protection sociale de la population marocaine
Le Roi a entendu se préoccuper des plus faibles et plus largement de ceux qui subissent les épreuves que la vie peut apporter, comme on l’a déjà évoqué s’agissant des situations exceptionnelles, mais cette volonté d’agir concerne également les situations plus ordinaires qui méritent aussi que l’on agisse.
. Avec tout d’abord l’Initiative nationale de développement humain (INDH) lancée le 18 Mai 2005 qui est un programme axé sur la lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale, dont le déroulement s’est effectué en trois phases.
. La première phase (2005/2010) s’est articulée autour de quatre programmes qui ont ciblé différentes catégories sociales concernées : la lutte contre pauvreté en milieu rural, l’exclusion sociale en milieu urbain et la précarité en ont été les principaux objectifs. Elle a été complétée par un programme transversal adressé à des communes non cibles sur la base d’appel à projets.
. La deuxième phase, (2011-2015), s’est caractérisée par une augmentation de l’enveloppe financière allouée. L’intervention a été dirigée également vers des communes rurales et les quartiers urbains pauvres, ainsi que vers un million de bénéficiaires dans 3300 villages appartenant à 22 régions montagneuses et isolées.
. Lors de la troisième phase (2019-2023), lancée le 19 septembre 2018 sous la présidence du Roi, il s’est agi de consolider les acquis enregistrés au cours des précédentes. Cette dernière étape a consisté en quatre programmes axés sur la réduction du déficit en termes d’infrastructures et de services de base dans les zones sous équipées, l’accompagnement des personnes en situation de précarité, l’amélioration du revenu et l’intégration économique des jeunes, ainsi que le soutien en faveur des générations montantes à travers l’investissement dans le capital humain.
. On doit relever que ce souci de l’action au service du développement du pays et de la protection de sa population et la cohésion sociale est une préoccupation constante du Roi Mohammed VI, dans la mesure où, alors même qu’il était Prince héritier, il a créé la Fondation Mohammed V pour la solidarité, le 5 juillet 1999. Depuis lors, la Fondation agit notamment pour lutter contre la pauvreté, permettre un accès aux services de base, l’inclusion économique des populations les plus modestes, ainsi que le soutien humanitaire.
. La protection sociale et l’assistance au quotidien ont vu également l’intervention du Monarque avec le Régime de l’Assistance Médicale (RAMED) basé sur les principes de justice sociale, de solidarité et de l’égalité de l’accès aux soins.
Lancé en novembre 2008, ce régime était destiné aux personnes en situation de vulnérabilité, de pauvreté et celles bénéficiaires de droit. Cette dernière catégorie regroupe les pensionnaires des établissements pénitentiaires, des établissements de bienfaisance et des orphelinats.
Le RAMED a permis d’assurer une couverture médicale et la gratuité des soins dans tous les hôpitaux et les établissements publics de santé sans discrimination aucune.
. Ce programme se poursuit aujourd’hui par la volonté de généraliser la couverture sociale en l’étendant ainsi à l’ensemble de la population. Entamée en 2022, la généralisation du système d’assurance maladie de base obligatoireprofite maintenant à 23,2 millions de personnes.
. Un système d’aide directe est également présent, il bénéficie aujourd’hui à 3,81 millions de familles, et est intervenu pour faire face également à des périodes exceptionnelles comme celles de la pandémie de covid 19.
. La protection de la famille a donné lieu, quant à elle, à la mise en place d’un nouveau régime d’allocations familialeslancé fin 2023.
. Il est prévu également de compléter le dispositif par un système d’indemnités chômage et pour perte d’emploi.
Une action forte qui a permis un développement économique soutenu
Sous l’impulsion du Roi Mohammed VI, d’un pays à vocation agricole, le Royaume s’est transformé en géant industriel continental, avec notamment plus de 600.000 voitures produites par an – avec un taux d’intégration de plus de 60%, des pièces utilisées dans les tous les avions du monde – , un secteur agroalimentaire à forte valeur ajoutée et une industrie textile en pleine mutation, le tout fonctionnant avec une énergie issue à 40% de sources renouvelables.
Des partenariats solides et d’avenir, diversifiés et stratégiques sont renforcés ou noués.
Ce sont les partenariats traditionnels, comme ceux avec la France et l’Espagne, pays qui se disputent aujourd’hui la première place.
Ou encore celui, historique, qui unit le Royaume aux États-Unis, et qui ne cesse de se raffermir et de s’étendre.
Et il y a également les nouveaux partenariats, notamment celui avec la Chine, illustré entre autres par l’implantation de la première gigafactory de batteries électriques du continent, conduite par Gotion High-tech pour un investissement de 65 milliards de dirhams, mais également avec la Russie. On citera également l’association avec les Émirats arabes unis, qui promet une étroite coopération dans un large éventail de secteurs et de domaines.
.La mue du pays s’effectue également avec le développement des structures portuaires et aéroportuaires.
On pense à la création de Tanger Med, qui est un acteur clé du commerce international faisant le lien entre l’Europe et l’Afrique et constituant le point de départ ensuite vers l’ensemble des pays du sud.
Il y a également ce qui participe de ce qu’on ne peut que qualifier de véritable « vision atlantique » du Roi Mohammed VI qui entend développer la façade ouest du pays en créant et renforçant des projets structurants.
C’est aussi que le projet Dakhla Atlantique est mis en place, il sera le pendant ouvert vers l’atlantique et l’Afrique de ce qu’est Tanger Med, et donnera une ouverture vers l’océan aux États du Sahel. Le Roi a également insisté sur le fait que cela devait aller de conserve avec le renforcement d’une flotte maritime pour donner au pavillon marocain toute la place qui devra être la sienne pour accompagner l’accroissement des échanges commerciaux ainsi suscités et y prendre sa légitime part.
Dans le même temps il est prévu, qu’avant 2030, la ligne grande vitesse aura fait la jonction entre Tanger et Agadir, que le réseau autoroutier totalisera 3.000 kilomètres et que les ports de Nador West Med comme celui de Dakhla Atlantique seront opérationnels.
Le Roi est à l’origine également du projet de Gazoduc Africain Atlantique Nigéria-Maroc – évalué à 25 milliards de dollars – qui doit traverser onze pays ouest-africains pour alimenter l’Europe en gaz.
Ce projet a été lancé en 2016 lors de la visite du Souverain à l’ancien président nigérian Muhammadu Buhari.
Des réunions de travail de haut niveau se sont tenues très récemment, du 15 au 19 juillet 2024, à Rabat, entre l’ensemble des pays traversés et les représentants de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
Les délégations des pays traversés étaient également présentes, à savoir la Mauritanie, le Sénégal, la Gambie, la République de Guinée, la Guinée-Bissau, la Sierra Leone, le Liberia, la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Bénin et le Nigeria, en la personne des directeurs généraux de leurs sociétés nationales pétrolières respectives. L’AGAO (Autorité du Gazoduc de l’Afrique de l’Ouest) était représentée par Chafari Hanawa, directrice générale.
Une défense constante de l’intégrité territoriale et de la souveraineté du Royaume
La question du Sahara Marocain a fait l’objet de l’attention constante du Roi face au jeu des certaines puissances étrangères et à la complexité des relations internationales. C’est une politique ferme, mais d’équilibre, qui a été menée, poursuivant celle de ses prédécesseurs, notamment dans la ligne de la Marche Verte en 1975, qui vit un peuple conduit par Feu le Roi Hassan II, affirmer et défendre la marocanité des Provinces du Sud.
L’approche envisagée est double, économique (on l’a déjà évoquée, avec le développement des projets structurants dans les Provinces du Sud), et politique, sur la base du projet d’autonomie sous souveraineté marocaine de 2007 présenté devant l’ONU, comme devant servir à la résolution du différend.
De plus en plus de pays ont considéré, avec la France très récemment (sur ce point cf l’analyse de Jean-Yves de Cara), qu’il constituait la seule solution crédible pour purger la question.
L’évidence des liens millénaires de ces Provinces avec le Maroc devient de moins en moins contestée, confortée par une intense activité diplomatique du Royaume qui permet de constater qu’aujourd’hui près d’une centaine de pays soutient fermement la souveraineté du Maroc sur son Sahara ou adhère à son plan d’autonomie. Concrétisant cet élan, 28 consulats généraux ont ouvert dans les villes de Laâyoune et Dakhla, au cœur du Sahara. Et plus de 84% des 193 États membres de l’ONU ne reconnaissent aucune légitimité aux visées séparatistes du Front Polissario et de son principal allié.
Un Royaume qui peut affronter l’avenir avec confiance
À la lumière de cette brève présentation, tout observateur honnête ne peut ainsi que constater le chemin favorablement parcouru par le Maroc depuis l’intronisation de Sa Majesté Mohammed VI, tant d’un point de vue politique qu’économique.
Une nouvelle Constitution en 2011, des avancées considérables du point de vue social, un développement économique qui se poursuit avec notamment la réalisation de projets structurants qui aménagent le territoire en renforçant son unité. Mais également une défense constante de son intégrité territoriale qui a porté ses fruits, notamment s’agissant de la question du Sahara Marocain.
Le Royaume du Maroc a su mettre en avant et en valeur sa situation géographique qui en fait le carrefour des rencontres entre l’Europe et l’Afrique mais également et, dorénavant, aussi entre l’Afrique et l’Atlantique, donnant une ouverture aux pays du Sahel. Il devient un partenaire essentiel d’un point de vue économique et politique pour de nombreux pays, mais également du point de vue de la sécurité générale, car il constitue un îlot de stabilité dans une zone qui est devenue, par le fait de politiques à courte vue de certains pays occidentaux, un foyer de dangers.
Par son rôle de promotion d’un Islam d’équilibre, par son Institut de formation des Imans, le Roi, Commandeur des Croyants assure, dans le Royaume et au-delà, la promotion d’une religion de tolérance et de paix, ce qui est essentiel dans l’état de tension dans lequel se trouve le monde arabo-musulman.
En outre, et en sa qualité de Président du Comité Al-Qods, le Roi Mohammed VI assure la défense des intérêts du peuple palestinien tout en maintenant le lien nécessaire avec la partie israélienne dont il serait peu sérieux de faire abstraction (on notera que ces liens ont permis notamment l’acheminement d’une aide humanitaire importante dans la Bande de Gaza). Il est à noter qu’avec la problématique de la gestion de l’eau, c’est de la question palestinienne, et en sa qualité précitée, que le Roi a fait son deuxième axe d’intervention prioritaire.
Jean-François Poli
Avocat à la Cour – Doyen honoraire de la Faculté de droit de Corse
Institut Méditerranéen de Droit et de Géopolitique