Malgré la campagne diplomatique et médiatique effrénée menée par le Président Tebboune, la candidature de l’Algérie à l’adhésion aux BRICS a été rejetée. Ce n’est pas une surprise. Tout autant la manœuvre de l’Afrique du Sud pour atténuer la fin de non-recevoir opposée à la demande algérienne en y associant, indûment, une candidature du Maroc a échoué.

La décision de la conférence des BRICS est un camouflet pour le Président algérien qui avait fait de cette adhésion une priorité de sa politique. Elle est une sanction de la mauvaise gestion chronique de l’économie algérienne : celle-ci souffre d’une dépendance excessive aux hydrocarbures, d’un défaut de diversification, d’une industrialisation défaillante, d’un report sine die des réformes nécessaires, telle celle du système bancaire, et de la lutte contre la corruption. Dans l’ordre politique, l’absence d’effort pour le développement humain et l’hostilité obsessionnelle envers son voisin, illustrée par le soutien au Polisario, pèsent lourdement sur la stagnation de l’Algérie. Pourtant, de façon répétée, le Souverain marocain appelle les Algériens à travailler avec le Maroc à l’établissement de relations normales entre les deux peuples frères. Lors du discours du Trône en 2022 Mohammed VI exhortait les Marocains à « préserver l’esprit de fraternité, de solidarité et de bon voisinage qui les anime à l’égard de (leurs) frères algériens » et assurait ces derniers « qu’en toute circonstance, le Maroc et les Marocains se tiendront toujours à leurs côtés ». En 2033, le Roi a réitéré ces assurances en direction de l’Algérie et de son peuple en confirmant qu’ils n’auront jamais rien à craindre de la malveillance de la part du Maroc. Ces appels à « travailler, main dans la main, à l’établissement de relations normales entre deux peuples frères, unis par l’Histoire, les attaches humaines et la communauté de destin » restent sans écho pour le moment alors qu’ils sont de nature à favoriser l’apparition d’un grand Maghreb à travers l’Union du Maghreb ou un autre cadre.

La décision du sommet de Johannesburg souligne aussi la vaine maladresse de la diplomatie sud-africaine emportée par sa malveillance à l’égard du Maroc. L’échec des manœuvres de l’Algérie et de l’Afrique du Sud, malgré le soutien de la Chine et de la Russie à la candidature algérienne, a suscité des sarcasmes et les représentants des deux puissances africaines méditeront peut-être le mot de Talleyrand selon lequel tout « ce qui est excessif est insignifiant ».

En revanche le sommet des puissances économiques émergentes a consacré l’adhésion à leur groupe de l’Argentine, de l’Arabie saoudite, des Émirats arabes unis, de l’Égypte de l’Éthiopie et de l’Iran.

Jusqu’à ce jour, le groupe des Brics représente 23% du PIB mondial et 42% de la population du globe. Il n’en est pas moins hétérogène car les cinq États, répartis sur quatre continents, sont dotés d’une économie à la croissance inégale. Incontestablement, l’entrée de nouveaux membres va modifier l’équilibre politique et économique du groupe des États émergents. Le poids des deux États du Golfe riches en hydrocarbures et au dynamisme financier croissant d’une part, l’adjonction de l’Iran d’autre part changent la portée géopolitique du groupe. A cela s’ajoutent le contrôle du canal de Suez par l’Égypte et la position stratégique de l’Éthiopie. Il ne s’agit pas seulement de changer le nom du groupe mais d’affirmer un contrepoids à l’influence occidentale et donc de modifier l’équilibre mondial.

Jean-Yves de CARA